Après cette journée mémorable sur le Salar, retour à Uyuni, la ciudad. On s’arrête au cimetière des trains : là, d’honorables locos du début du siècle finissent paisiblement leur vie,  après un dur labeur et des années à transporter les tonnes d’argent de l’époque dorée du conquistador…

On fait un peu d’Urbex entre les rails rouillés et les carcasses plus ou moins bien conservées de ces vieilles machines. On longe les rails dans notre 4x4 à travers le désert du Sud-Lipez en direction de la petite bourgade de San Juan la romantique. On laisse derrière nous les panoramas uniques du Salar pour mieux admirer le volcan Ollagüe, majestueux.

Seuls clients de l’hôtel la Magia de San Juan, le proprio prône l’économie : pas de chauffage, lumières rares…. Il nous concocte un repas typique que nous dégustons à la douce lumière des chandelles, magique Saint Jean ! Le lendemain matin, petit déjeuner en bonnet de laine et départ dans l’aube fraîche et vivifiante. On croise une haie de cactus géants. Il est bien tôt, ça pique !

Nous entamons une lente montée vers les lacs de l’Altiplano, en contournant le Salar de Chiguana. Notre guide et chauffeur Alvaro maîtrise son 4x4 sur des pistes de sable et de cailloux. Le peu de végétation qu’on aperçoit est squatté par les lamas, alpagas et leurs cousines, les sauvages vigognes.

Les lacs peu profonds que nous longeons sont de magnifiques refuges pour des centaines de flamants roses qui ont réussi à s’acclimater à ces altitudes peu communes. Après une marche dans le vent glacial, nous nous attablons autour d’un pique-nique bolivien (merci encore Madame Alvaro !).

Notre véhicule reprend la piste, musique diverse et variée, entre classique rock et airs boliviens enchanteurs. Juliette est ravie !

Nous entrons dans un canyon à la recherche des viscachas. Pour ça, quelques tranches de pain et un peu de patience suffiront à attirer vers nous quelques spécimens peu sauvages.

Le viscacha est un lapin des Andes, nous en avions aperçu sur le site de Machu Picchu : une paire de grandes oreilles (typique du lapin all over the world !), et une drôle de queue (voir photos).

Notre traversée du désert de Siloli s’arrête alors que nous croisons d’étranges sculptures naturelles dont le fameux arbre de pierre.

Quelque trente minutes plus tard, se dessine une autre merveille, spectaculaire par sa couleur rouge vif, dûe aux algues et planctons qui prospèrent dans cette eau riche en minéraux : sodium, magnésium, borax, gypse, paradis des géologues. Les bords du lac sont soulignés d’un dépôt blanc, cristallisation des éléments chimiques locaux.

Ce lac magique passe d’un bleu vert au matin à un rouge profond dans l’après-midi. Voilà un désert bien loin de la monotonie !

On finira cette journée plus que remplie, – tableaux aux couleurs incroyables -, par une nuit étoilée au milieu de nulle part : un hôtel construit tel une base polaire au milieu d’un des déserts les plus extrêmes de la planète. La glycémie de Juliette n’aura qu’à bien se tenir, nous voilà à plus d’une journée de 4x4 de toute «civilisation».

Celle-ci préfère se faufiler sous une couette douillette plutôt que nous accompagner dans la fraîcheur revigorante de la nuit : la voûte céleste est ici merveilleuse. Loin, bien loin de toute pollution lumineuse, des milliers d’étoiles brillent au-dessus de nos yeux écarquillés et frigorifiés ! Sensation de bout du monde…

Le lendemain, direction les geysers de Sol de Manana, 4 850 mètres d’altitude. Ce champ de geysers est produit par l’activité volcanique sous-jacente qui se manifeste par la présence de cratères bouillonnants et glougloutants, fumeroles légères de vapeur sulfureuse et geysers blancs d’eau bouillante. Nous voilà transportés dans un monde lunaire et volcanique des plus surréalistes ! Imaginez un dragon qui prendrait son bain de boue brûlante et se laisserait aller à quelques flatulences oeuf pourri ! Après ce spectacle de la quatrième dimension, nous redescendons vers les thermes de Polques : baignade relaxante dans les 33 degrés bienvenus de ces eaux bénéfiques, bonnet de laine et maillot de bain !

Parfaitement détendus, nous pouvons poursuivre notre visite matinale vers le Salar de Chalviri. Nous traversons les formes étranges du Désert de Dali : tableaux ornés de rochers gigantesques aux formes extravagantes, posés sur un sable ocre. Petite séance shooting et on redémarre, ACDC et Queen nous accompagnent vers la Laguna Verde : la couleur de ses eaux est liée à la concentration de carbonate, soufre, plomb, arsenic et calcaire : autant vous dire qu’on ne se baignera pas dans ce petit paradis des chimistes ! Ses nuances changent en fonction des vents.

Voilà déjà trois journées inoubliables de 4x4 qui s’achèvent, trop vite à la frontière bolivo-chilienne de Hito Cajon.

Plantée au milieu du désert, sans réseau ni communication (excepté la route), notre passeur chilien nous a posé un viscacha ! Notre guide heureusement se démène pour trouver une alternative et ne pas nous abandonner là…

Un minibus chilien apparaît au loin. Il s’approche pour déposer une flopée de japonais côté bolivien. Après quelques negociaciones y tergiversaciones, et quelques billetes verdes, nous voilà entassés à douze dans un neuf places, bagages entassés, advienne que pourra ! Notre conductor chileno est ravi de l’aubaine !

Le rétroviseur chargé de billets nous rappelle que nous entrons au Chili, pays du business s’il en est ! La route est nettement plus goudronnée que son homologue bolivienne, un chapelet de 23 volcans rythme notre descente le long du canyon.

Musette du dimanche dans les oreilles, nous quittons les hautes altitudes pour San Pedro de Atacama : changement radical de climat et d’ambiance : des cinq degrés venteux du matin bolivien, nous passons allégrement à un bon 35 bien sec dans l’après-midi chilien : la piscine sera notre refuge, sans bonnet cette fois. Nous partageons cette baignade bienfaisante avec deux sistas de Chicago bien bavardes !